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Santé

Covid-19 : pour sortir de réanimation, certains patients sont trachéotomisés

Pour libérer des places dans les services de réanimation submergés par les malades atteints du coronavirus SARS-CoV-2, certains services trachéotomisent les patients les plus stables. Ils sont ensuite pris en charge par une équipe d'ORL.

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trachéotomie

Certaines unités médicales utilisent la trachéotomie pour libérer des places en réanimation et permettre un meilleur retour à la normale pour le patient après son intubation.

BURGER / Phanie / Phanie via AFP

Pour pallier la vague de patients qui affluent dans les hôpitaux, les équipes médicales ont recours à plusieurs solutions. Surveillance des patients à domicile grâce au programme Covidom, transferts de malades en train ou en hélicoptère ou oxygénation à domicile des patients les plus stables font partie des recours employés depuis le début de la crise du Covid-19. Pour libérer des places dans les services de réanimation et permettre un retour à la normale tout en douceur au patient, plusieurs hôpitaux ont recours à la trachéotomie chez les patients dont l'état de santé le permet. Une initiative testée à la Pitié-Salpêtrière, qui vient de mettre en place une équipe de médecins ORL chargés d'encadrer ces patients d'un genre nouveau.

La trachéotomie est une petite ouverture réalisée à la base du cou, dans la trachée, pour avoir un accès aux voies aériennes. Elle peut être pratiquée en urgence, lorsqu'un malade ne parvient plus à respirer suite à une obstruction des voies aériennes. La trachéotomie est également pratiquée dans le cas de cancer du larynx. Cette fois, la trachéotomie pourrait avoir un rôle à jouer dans la crise du SARS-CoV-2. "Les patients atteints du Covid-19 présentent un syndrome respiratoire aigu (SDRA). Ils ont besoin de beaucoup d'oxygène, c'est pourquoi il faut les endormir et les intuber pour les aider à respirer", explique la docteur Mylène Drouillard, ORL à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Avec des poumons très abîmés par le SARS-CoV-2, ces patients nécessitent une grande concentration d'oxygène afin de maintenir leur organisme. Un procédé qui dure parfois très longtemps. "Ils peuvent rester jusqu'à trois semaines ou un mois en réanimation, ce qui abîme la trachée et le larynx, qui peuvent nécroser. Il leur faut aussi une importante dose de drogues pour qu'ils restent endormis et qu'ils n'essayent de retirer la sonde d'intubation."

Une prise en charge destinée aux patients stables

C'est pourquoi une unité spéciale composée d'ORL vient d'être créée à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Elle accueille depuis fin mars 2020 des patients qui étaient intubés et stables. "Nous avons constaté un plateau dans l'état des patients, entre le 8e et le 10e jour d'intubation, un moment où ils se portent bien", explique la docteure Mylène Drouillard. C'est à ce moment là que ces patients peuvent être réveillés et trachéotomisés. "Concrètement, il s'agit de réaliser une petite incision pour avoir accès à la trachée du patient. On y insère un cathéter, qui dilate légèrement l'ouverture. Chez les patients obèses, le geste devient chirurgical et est réalisé par une équipe mobile, directement au lit du patient. C'est un geste assez technique dans le cadre de l'épidémie de coronavirus. Le personnel médical, qui est en contact avec la trachée, doit prendre de multiples précautions pour éviter une contamination par aérosol." Une canule, un petit tube courbé d'une dizaine de centimètres, est ensuite placée dans l'orifice. L'air nécessaire au fonctionnement de l'organisme ne passe plus par les voies aériennes supérieures, comme la bouche et le nez. Il va directement de la trachée vers les poumons. Grâce à la canule, les patients atteints de Covid-19 peuvent recevoir une quantité importante d'oxygène. Une prise en charge importante lorsque les poumons sont très abîmés.

La trachéotomie pour sortir plus vite de réanimation

"Cela leur permet de recevoir encore de l'oxygène en quantité suffisante et de sevrer tout en douceur des ventilateurs. Pour le moment, les patients que nous avons accueillis dans le cadre de cette procédure sont sortis plus vite de réanimation", souligne la docteure Mylène Drouillard. Le séjour prolongé dans un service de réanimation entraîne aussi une amyotrophie, une atrophie des muscles qui ne sont plus assez sollicités ainsi que des encéphalopathies, des troubles de la conscience, des troubles moteurs ou sensitifs. Raccourcir le séjour en réanimation protège de ces risques, d'autant que la trachéotomie permet un retour à la normale plus progressif. "Les patients pratiquent de la kinésithérapie respiratoire deux fois par jour, voient des orthophonistes et ont également une prise en charge par un nutritionniste." Une façon de réapprendre à marcher, respirer, parler comme avant. 

Difficile de dire pour le moment combien de temps les malades vont rester dans l'unité spéciale de trachéotomies. Les premiers patients viennent à peine d'arriver. Mais cette nouvelle unité de la Pitié-Salpêtrière s'attend à un afflux prochain de nouvelles personnes à soigner. "Nos malades actuels ont présenté leurs premiers symptômes le 14 mars. Nous nous attendons donc à une vague dans les jours qui viennent." Une fois sortis de l'unité spéciale, les patients n'en conserveront qu'une cicatrice sur le cou. Dans le cadre de trachéotomies provisoires, l'orifice du pharynx se referme quelques jours après le retrait de la canule. Contactée par d'autres structures hospitalières intéressées par cette procédure, la Pitié-Salpêtrière a mis au point un mode d'emploi pour pouvoir mettre en place ce type d'unité dans d'autres hôpitaux. 

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