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Santé

Anti-vaccins : le Pr Henri Joyeux invoque la "liberté d'expression" pour éviter la radiation

Accusé de "mise en danger de la santé publique" suite à deux pétitions anti-vaccins, le Pr Henri Joyeux invoque la "liberté d'expression" pour éviter la radiation de l'ordre des médecins lors d'une audience disciplinaire.

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Anti-vaccins : le Pr Henri Joyeux invoque la "liberté d'expression" pour éviter la radiation

Le Pr Henri Joyeux, lors d'une conférence de presse sur la vaccination le 7 novembre 2017 à Paris.

STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Praticien coupable d'avoir "mis en danger la santé publique" en contestant certains vaccins ou citoyen faisant usage de sa liberté d'expression ? Après une audience disciplinaire jeudi 24 mai 2018, le controversé professeur Henri Joyeux saura dans quelques semaines s'il est radié de l'Ordre des médecins.

Radié en 2016 pour "mise en danger de la santé publique" par deux pétitions anti-vaccins

Le Conseil de l'Ordre reproche en effet au professeur Joyeux d'avoir "mis en danger la santé publique (...) en faisant douter davantage la population de l'intérêt de la vaccination", selon son représentant, le docteur Jean-Marcel Mourgues. En cause, deux pétitions publiées sur internet en septembre 2014 et mai 2015 par ce professeur cité en exemple par les anti-vaccins et contesté par une large partie de la communauté médicale. La première s'élevait contre une recommandation du Haut conseil de la santé publique, jamais suivie par le gouvernement, préconisant d'abaisser de 11 à 9 ans l'âge de la vaccination contre le papillomavirus pour les filles. La seconde fustigeait le remplacement du vaccin DTPolio trivalent (c'est-à-dire protégeant contre trois maladies, la diphtérie, le tétanos et la polio) par un vaccin hexavalent (protégeant contre six affections). Le professeur montpelliérain de 72 ans avait alors été radié en première instance le 8 juillet 2016 par la chambre disciplinaire du Languedoc-Roussillon mais avait fait appel et la sanction avait été suspendue. C'est cet appel qu'a examiné la chambre disciplinaire nationale lors d'une audience présidée par une Conseillère d'Etat, Hélène Vestur. La décision devrait être connue d'ici trois à six semaines.

En 2017, il avait à nouveau donné une conférence avec le Pr Montagnier, virologue, prix Nobel de Médecine, membre de l'Académie des Sciences et de l'Académie de Médecine et très controversé pour ses positions anti-vaccin. Ils y affirmaient ainsi haut et fort ne pas être opposés à la vaccination ce n'était que pour mieux saper ses fondements par la suite. “Nous risquons avec les vaccins d'empoisonner petit à petit toute la population qui va nous succéder, les enfants, les bébés”, lançait par exemple Luc Montagnier dans un accès de fièvre alarmiste. “Nous entrons dans une sorte de dictature vaccinale…” clamait de son côté Henri Joyeux. Sciences et Avenir avait alors décortiqué tous les points de leur argumentation pour y apporter des réponses validées par la communauté scientifique. Le Pr Joyeux continue également à donner des conférences partout en France sur les thèmes de la nutrition, mais également de la vaccination.

Une des conférences proposées en juin 2018 par le Pr Joyeux sur son site officiel et traitant des vaccins. Capture d'écran datant du jeudi 24 mai 2018.

En appel, le Pr Joyeux invoque "la liberté d'expression"

En première instance, le professeur Joyeux était de son propre aveu venu "les mains dans les poches". En appel, il s'est adjoint les services d'un avocat, Me Jean-François Jésus. "Il a fait le choix d'un défenseur dont le patronyme peut amuser, mais j'ai eu le sentiment d'une excommunication, d'une crucifixion avec cette radiation", a assuré l'avocat, dont le client a présidé de 2001 à 2013 l'association réputée conservatrice "Familles de France". Lors d'une plaidoirie de trois quarts d'heure, Me Jésus s'est appliqué à démontrer que le professeur Joyeux, qui s'est d'abord fait connaître du grand public par des conseils de diététique, n'était pas opposé à la vaccination. "Il n'est pas anti-vaccin, il est contre les excès", a affirmé l'avocat, en ironisant sur "le monstre dont les vrais anti-vaccins disent qu'ils le trouvent mou". L'un des chevaux de bataille de Henri Joyeux, comme de tous les anti-vaccination, est la présence d'aluminium comme adjuvant dans certains vaccins. Il pense que cela peut provoquer des maladies, ce qui n'est corroboré par aucune étude.

Pour lui, les propos du professeur Joyeux relèvent de "la liberté d'expression". "Si le professeur Joyeux a le droit d'exprimer une position personnelle, il devait préciser qu'elle n'est pas validée par la communauté scientifique", répond le Conseil de l'Ordre. Ce dernier juge que le praticien s'était "exprimé en connaissance de cause dans un contexte de méfiance" envers la vaccination. "Le professeur Joyeux se défausse en disant qu'il n'est pas responsable de cette défiance", a dit le docteur Mourgues, en citant une étude internationale de 2016 selon laquelle 41% des Français pensent que les vaccins ne sont pas sûrs. 

Le conseil départemental de l'Ordre de l'Hérault s'est joint à l'appel du Pr Joyeux, en jugeant sa radiation "disproportionnée" et "vexatoire" vu son âge. Retraité depuis 2014, le professeur Joyeux dit "continuer à consulter bénévolement à (son) domicile": "J'ai prêté le serment d'Hippocrate en 1972, j'y resterai fidèle jusqu'à mon dernier souffle".

Avec AFP.

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