Des sons qui virevoltent autour de la tête et qui plongent l’auditeur dans une fiction vécue de l’intérieur, comme le fait la réalité virtuelle avec un casque-écran : concrétisée dans le projet d’une étudiante de e-artsup, cette idée, avec les odeurs en plus, a conduit à une belle réalisation, vers les non-voyants mais aussi les enfants, et bien d'autres publics. Marie Renault nous explique son invention.

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    Il faut écouter l'aventure de cette femme qui entre par hasard dans un barbar étrange et qui plonge, littéralement, dans un livre de Jules VerneJules Verne, jusqu'à se retrouver dans le sous-marinsous-marin Nautilus. C'est simple, il suffit de cliquer là : sur « Entre les lignes ». Il vous manquera seulement les odeurs pour goûter cette originale réalisation d'une réalité virtuelle sans images.

    Baptisé IN2 (à prononcer into, dedans, donc), ce concept est l'idée de Marie Renault, qui a réalisé un prototype finalisé pour son projet de fin d'études de l'école e-artsup. Ses élèves ont l'opportunité de développer un projet abouti, visible par de nombreux professionnels durant les deux ou trois jours d'expositions. Pour l'ambiance, il s'appuie sur les sons binauraux. Cette technique consiste à reproduire ce qu'entendrait une personne en simulant l'effet de la perception par la boîte crânienneboîte crânienne. C'est ce qui nous permet de savoir qu'un bruit vient de devant ou de derrière, la simple stéréophonie ne donnant qu'une indication de la source sur l'axe droite-gauche. Le procédé utilise des microphones orientés dans différentes directions et un traitement du signal qui, notamment, déphase certains sons, de sorte qu'ils soient perçus avec un peu de retard ou un peu d'avance. Nous en avions présenté une applicationapplication dans le projet Onidream.


    Marie Renault explique son innovation. © Marie Renault, YouTube

    Audio sophistiquée, machine à odeurs : IN2 est un travail d'équipe

    Mais pourquoi pas d'images ? « J'ai mixé plusieurs influences, explique Marie Renault. Je suis sensibilisée au handicap par mon entourage et ma passion est de partager, d'aider et de raconter des histoires. J'adore aussi les podcasts, parce que j'ai du mal à lire dans le métro. Cette idée est née d'autres sources d'inspirations, comme le jeu Blind Legend, la série Doctor Who et l'ouvrage Notes on blindness adapté en film puis en expérience de réalité virtuelle par Arte. C'est sans doute ce qui m'a amenée à penser à un nouveau concept de réalité virtuelle adaptée aux déficients visuels. » Pour ce qui est des odeurs, Marie avait l'expérience de sa sœur, Coraline, future « neznez ».

    Mais comment réaliser une machine capable de les diffuser à bon escient sans les mélanger ? L'étudiante de e-artsup est allée à Epitech, école d'informatique, et a posé la question à Théo Grevet. Solution trouvée : un système emprisonnant les parfums dans des caissons séparés, le tout réalisé avec une imprimante 3D. Pour l'audio, Marie Renault s'est fait aider par Norman Cooper, ingénieur du soningénieur du son qui a travaillé sur la série Calls, et par Hervé Déjardin, ingénieur du son à Radio France et professionnel passionné par le son binaural. Le matériel de prise de son a été prêté par une entreprise, Sennheiser. Et deux amis, malvoyant et non-voyant, ont contribué aux essais. Cette aventure collective est racontée dans une brève vidéo sur le site d’IN2.

    Le résultat final a été présenté à l'édition 2018 de Vivatech et lors des projets de fin d'année sous la forme d'un produit complètement fonctionnel. « Le troisième jour, il y avait la queue sur mon stand. J'ai fait mon pitch à une centaine de personnes. » Marie Renault dit avoir reçu des propositions mais cette spécialiste en motion design préfère ne pas se hâter et prendre le temps de choisir ses collaborations. « Le public possible est plus large que celui des mal voyants. Je pense aussi aux personnes hospitalisées, aux musées, aux escape game... J'aimerais développer d'autres histoires, notamment en restant dans le thème du voyage fantastique. »