Si plusieurs pays s'étaient engagés en faveur d'un partage équitable des vaccins, la réalité est tout autre. Cette situation, au-delà du sentiment d'injustice, pourrait allonger la durée de la pandémie.


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    Plus de 75 % des vaccins contre le SARS-CoV-2 ont été délivrés dans seulement dix pays. Dix pays représentant 60 % du PIBPIB mondial, mais uniquement 16 % de la population. Dans environ 130 pays, comptant 2,5 milliards de personnes, aucun vaccin n'a encore été administré. Ce constat alarmant est celui de Gavin Yamey, directeur du Center for Policy Impact in Global Health à l'Université Duke, en Caroline du Nord (États-Unis). Suite à une étude menée en équipe, il publie un article d'opinion dans Nature, où il suggère que la théorie des jeux est un outil à prendre en compte pour endiguer au mieux la pandémie de coronavirus.

    « Une épidémie de Covid-19Covid-19 n'importe où pourrait devenir une épidémie partout », souligne Gavin Yamey. Chaque pays étant un réservoir de virusvirus pouvant s'étendre de par le monde, mais également de variants. Il apparaît que si la pandémie n'est pas combattue dans chaque pays, elle pourrait resurgir dans un pays en cours de vaccination.

    Bien que les vaccins actuellement autorisés n'empêchent pas l'infection, et que les données ne permettent pas de savoir s'ils empêchent la transmission, ces vaccins réduisent considérablement la charge viralecharge virale. Si cela ne change rien aux probabilités mêmes de mutation des virus, cela réduit le nombre total de mutants dans la population virale. Puisque cette population est plus petite. De la même façon, une charge virale plus faible ralentit la transmission - si transmission il y a -, ce qui conforte l'utilité de la vaccinationvaccination, comme nous l'expliquions ici.

    Le partage des vaccins serait un levier crucial pour mettre un terme à la pandémie de SARS-CoV-2. © leszekglasner, Adobe Stock
    Le partage des vaccins serait un levier crucial pour mettre un terme à la pandémie de SARS-CoV-2. © leszekglasner, Adobe Stock

    Rebattre les cartes

    Dès le départ, une équipe d'acheteurs a été créée pour répartir au mieux les doses de vaccin : le Covax (Covid-19 Vaccines Global Access), codirigé par l'Alliance du vaccin, la coalition pour les innovations préparant aux épidémies, et l'OMS (Organisation mondiale de la santéOrganisation mondiale de la santé). Mais plusieurs pays s'en sont affranchis et ont négocié, de leur côté, l'achat de vaccins. Conduisant à cette situation d'iniquités. 

    Gavin Yamey propose d'y remédier par des dons : « Peut-être que pour neuf doses [administrées dans les pays plus riches], ils peuvent donner une dose à Covax. C'est loin d'être "équitable", mais c'est dans les limites du possible. Cela aidera au-delà de l'atténuation du risque d'épidémie d'une variante importée, contre laquelle les vaccins stockés auraient pu réduire l'efficacité. » Une voie notamment empruntée par la Norvège.

    D'après des sondages, Gavin Yamey considère que cette solution serait soutenue par nombre de citoyens. En s'appuyant sur la théorie des jeux, un domaine des mathématiques expliqué par Le Monde, il estime que « si le monde riche continue de stocker des vaccins, la pandémie pourrait se prolonger jusqu'à sept ans de plus ».